Des travailleurs toujours plus mobiles en Bourgogne-Franche-Comté

(photo d'illustration)

Pollution provoquée par le transport et hausse du prix des carburants : habiter loin de son lieu de travail pèse sur l’environnement et le budget des ménages. Pourtant, plus du tiers des actifs occupés de Bourgogne-Franche-Comté travaillent en dehors de leur intercommunalité de résidence. Cela représente près de 420 000 navettes quotidiennes, dont 94 000 traversent les frontières régionale voire nationale. La région compte en effet plus d’actifs occupés que d’emplois.

De plus en plus de navetteurs

En dix ans, la région a gagné 50 000 navetteurs, soit une progression annuelle de 1,2% des actifs travaillant en dehors de leur EPCI de résidence. Ils représentent ainsi 37% des actifs occupés en 2016, contre seulement 32% en 2006. Un constat amplifié par l’évolution de l’emploi, au sens du recensement de la population ; celui-ci a baissé de 0,4% en moyenne annuelle sur cette même période, soit un recul de 4% sur dix ans. Ces pertes d’emploi touchent l’ensemble des EPCI, excepté ceux autour des plus grandes agglomérations. Elles ont été d’abord plus fortes dans l’ouest de la région, puis se sont généralisées, n’épargnant que le sud de la Côte-d’Or et du Jura et quelques territoires à l’est de Besançon. De 2006 à 2016, à peine un quart des intercommunalités de la région gagnent significativement des emplois. La baisse concerne en premier lieu les emplois productifs, qui ont diminué de 1,1% en moyenne annuelle, soit un recul de 10% sur dix ans. L’emploi présentiel, qui répond aux besoins de la population vivant sur le territoire, s’est quant à lui maintenu.

Moindre croissance du nombre de navetteurs sur la période récente

De 2011 à 2016, les navetteurs progressent encore dans deux EPCI sur trois. C’est toutefois moins qu’entre 2006 et 2011, quand leur nombre augmentait dans neuf EPCI sur dix et de plus de 2% par an dans la moitié d’entre eux. Ce ralentissement concerne très majoritairement les intercommunalités longeant la frontière avec la Suisse. Là où l’augmentation des navetteurs était forte dans le passé, la progression se poursuit mais s’essouffle. Le plateau de Russey passe ainsi par exemple de 6,9% de croissance annuelle entre 2006 et 2011 à 2,7% de 2011 à 2016. C’est aussi le cas dans une moindre mesure du Val de Morteau, Altitude 800, du Grand Pontarlier et des Portes du Haut-Doubs. Pour d’autres territoires à l’inverse, le développement des navettes est un phénomène récent. C’est le cas notamment de Dijon Métropole et des intercommunalités constituées autour de Pierre-de-Bresse et de Frasne, où elles ont progressé de plus de 2% par an de 2011 à 2016 quand elles n’avaient pas augmenté ou très peu de 2006 à 2011. Dans l’intercommunalité de Frasne, qui n’est pourtant pas voisine de la Suisse, le nombre de travailleurs frontaliers a notamment progressé de 6,6% par an sur la période récente.

La Suisse très attractive, mais moins qu’auparavant

En 2016 dans la région, 36 000 résidents traversent chaque jour la frontière nationale pour travailler, soit 14 650 de plus qu’en 2006. Ils se rendent presque exclusivement en Suisse et représentent 9% des navetteurs régionaux, contre à peine 6% dix ans auparavant. Cette attractivité de l’étranger reste très forte mais semble s’essouffler. De 2011 à 2016, le travail frontalier progresse encore de 4,3% par an, mais on est loin des 6,4% de la période 2006-2011. Les frontaliers continuent de porter néanmoins l’augmentation des navetteurs dans la région. Leur influence est même plus forte récemment, en dépit du ralentissement : de 2011 à 2016, ils représentent 40% de la croissance, c’était 25% de 2006 et 2011. Dans quinze EPCI de la région, au moins un quart des navetteurs résidents travaillent à l’étranger, et même plus des trois quarts dans les intercommunalités du Val de Morteau, de la Station des Rousses-Haut Jura, du Grand Pontarlier et des Lacs et Montagnes du Haut-Doubs.

Recul des navetteurs à l’ouest et au nord-est de la région

Le nombre de navetteurs diminue dans un EPCI sur cinq de 2011 à 2016 contre moins d’un sur dix de 2006 à 2011. Les territoires concernés sont situés principalement à l’ouest de la région, en Haute-Saône et à l’ouest du Jura. La baisse est particulièrement forte dans les intercommunalités du Haut Nivernais-Val d’Yonne, de Marcigny, du Grand Autunois Morvan, d’Avallon-Vézelay-Morvan ou encore du Pays de Luxeuil, des territoires qui pourtant gagnaient précédemment des navetteurs de manière significative. Avallon-Vézelay-Morvan passe ainsi par exemple d’une croissance annuelle de 4,4% entre 2006 et 2011 à une baisse de 1,9% entre 2011 et 2016. La diminution du nombre de navetteurs est très majoritairement due à des pertes d’actifs résidents, qu’il s’agisse de départs en retraite ou de mobilités résidentielles. La part d’actifs mobiles ne recule réellement que dans certaines intercommunalités : Autun, Avallon, Pouilly-en-Auxois, la Bresse-Haute-Seille et les Portes du Jura.

Augmentation des navetteurs dans les plus grands EPCI

Les plus grands EPCI, métropoles, communautés d’agglomération et communautés urbaines, comptent moins de navetteurs résidents en proportion de leurs actifs occupés que le reste de la région : 20% en moyenne et seulement 14% pour Dijon Métropole et 13% pour le Grand Besançon. Ces territoires gagnent néanmoins de nombreux navetteurs sur dix ans, et ce malgré une baisse de la population active. La progression est au-dessus de la moyenne régionale dans quatre EPCI, parmi lesquels on retrouve les intercommunalités de Mâcon et Beaune, les deux seules à gagner significativement de l’emploi sur la période. C’est toutefois dans le Pays de Montbéliard, EPCI qui perd le plus d’emplois de 2006 à 2016, que l’augmentation du nombre de navetteurs sortants est la plus nette, et de loin : 3% en moyenne annuelle. De manière générale, ce sont surtout les flux entre grands EPCI qui augmentent. Les navetteurs résidents à Dijon et travaillant à Besançon sont par exemple passés de 300 à 600.

Forte attraction des grands EPCI

Les quatorze plus grands EPCI sont aussi ceux qui emploient le plus grand nombre de navetteurs, avec notamment 45 000 pour Dijon Métropole et 26 000 le Grand Besançon. Les navetteurs entrants dans ces EPCI ont progressé de 1% en moyenne annuelle sur dix ans. De 2006 à 2011 la hausse atteignait même 1,6% avant de ralentir à 0,7% de 2011 à 2016. C’est particulièrement frappant pour l’intercommunalité de Mâcon, qui passe d’une progression de 3,5% à une quasi-stabilité sur période récente. Les intercommunalités de Nevers et Vesoul perdent désormais des navetteurs entrants et le phénomène s’accélère dans le pays de Montbéliard, qui en perdait déjà de 2006 à 2011. La progression des navetteurs entrants accélère néanmoins dans quelques-uns de ces EPCI, comme le Grand Sénonais et le Grand Dole. Elle double même dans l’Auxerrois, pour un rythme annuel de 1,8% de 2011 à 2016. Dans l’intercommunalité de Beaune, la hausse atteint 2,6%. Ces quatre territoires sont sur période récente les seuls à gagner de l’emploi parmi les grands EPCI.

(texte Insee, Madeline Bertrand, Odile Thirion)