Denis Sommer : « remplacement de l’ISF par l’IFI, j’ai hésité, réfléchi, j’ai décidé »

Denis Sommer, Député 3ème Circonscription du Doubs (photo Facebook Denis Sommer)

Denis Sommer, Député LREM de la 3ème Circonscription du Doubs, s’exprime concernant le remplacement de L’Impôt de Solidarité sur la Fortune (ISF) par l’Impôt sur la Fortune Immobilière (IFI) :

« Remplacement de l’ISF par l’IFI : j’ai hésité, réfléchi, j’ai décidé. Encourager l’investissement dans nos PME – PMI . J’ai voté en faveur de la transformation de l’ISF par un impôt sur la fortune immobilière (IFI), une mesure qui était dans le programme d’Emmanuel Macron et clairement annoncée. Une réforme qui a du sens : il s’agit de taxer la rente, ce mécanisme addictif d’auto-enrichissement, plutôt que le capital utile à notre économie et à l’emploi. Je ne mets pas sur le même plan celui qui a accumulé plus de 1,3 million d’euros engrangeant des rentes personnelles ou spéculant sans être utile à l’économie, et celui qui investit, avec les risques que cela suppose, dans les entreprises, dans une épargne qui sert l’investissement alimente les possibilités de prêts aux particuliers, c’est à dire nourrit l’économie, la croissance, donc l’emploi »

« Nous avions l’ISF et un chômage de masse »

« Supprimer l’ISF, c’est mettre un terme à un impôt que nous sommes seuls à avoir en Europe avec l’Espagne et qui n’atteignait plus ses objectifs. Qu’a produit l’ISF : 10.000 foyers fiscaux expatriés et 35 Mds d’euros partis légalement à l’étranger (on parle bien d’évasion des capitaux, légale, et pas de triche fiscale dont le gouvernement fait la chasse) ! 35 Mds, c’est plus que le budget annuel de nos armées ou de la formation professionnelle ! Pour un gain final annuel d’un peu plus de 4 Mds d’euros ! Faites les comptes ! Par-delà le jugement moral que chacun peut avoir sur ceux qui ont ainsi fuit l’impôt, et le mien est sévère, le calcul du gouvernement est donc simple : renoncer à 3,2 Mds de recettes de l’ISF (l’IFI rapportera 800 millions) pour retrouver tout ou partie des 35 Mds d’euros partis s’investir à l’étranger et qu’ils servent nos entreprises et nos emplois« .

« L’industrie allemande c’est 24% de la richesse nationale, 14% en France »

« C’est très tendance de regarder outre-Rhin pour citer de bons exemples de saine gestion et de bonne politique économique. Prêtons-nous donc à cet exercice. L’Allemagne a supprimé son ISF en 1997. En France la capitalisation boursière atteint 87,5% du PIB (richesse nationale produite dans une année). Et près de 50% de ces capitaux sont étrangers. En Allemagne c’est seulement 49,5% du PIB et leur puissance industrielle est bien plus grande que la nôtre (24% contre 14%). L’essentiel de la capitalisation des entreprises en Allemagne est Allemande. Les grandes, les moyennes et petites entreprises beaucoup plus nombreuses et solides qu’en France trouvent leurs ressources financières en Allemagne ; ainsi les capitaux sont plus stables, les entreprises sont sécurisées et trouvent les moyens nécessaires pour financer l’innovation et leur développement. Conclusion : l’argent, en Allemagne, finance la capacité de production, la croissance et l’emploi allemands. En France, il était taxé, fuyait à l’étranger, et notre patrimoine industriel tombait dans des mains chinoises, des fonds de pension américains ou qataris. Le pari du gouvernement, j’y souscris, et de rompre ce mouvement mortifère pour nos entreprises et notre économie. Et, par conséquent, de réduire le chômage par cette voie là aussi« .

« Pour une évaluation dans 2 ans »

« J’avais toutefois, avec certains collègues députés, émis trois demandes fortes pour encadrer cette réforme avec justesse et justice :
1. Que les biens de luxe ostentatoires, qui sortent de l’assiette du nouvel impôt, fassent l’objet d’une surtaxe significative. Pour la même raison : ils ne sont pas des placements productifs pour notre économie. C’est chose faite puisque le PLF introduit une hausse de 10% de ces taxes.
2. Que soit maintenus les abattements pour les dons aux organisations d’intérêt Public et le plafonnement et abattement de 30% sur la résidence principale qui ne peut être taxée comme une résidence secondaire ou un placement immobilier spéculatif. C’est chose acquise et votée dans le PLF 2018.
3. Que le remplacement de l’ISF par l’IFI fasse l’objet d’une mission d’évaluation qui présentera un rapport dans deux ans, pour vérifier qu’il s’agit bien d’une bonne décision de finances publiques. Elle nous dira si cette transformation de l’impôt sur la fortune s’est bien traduite par une augmentation des placements vertueux : ceux qui participent au financement de l’économie productive. C’est chose faite. Le ministre de l’Economie, Bruno Le Maire, au nom du groupe, en a pris l’engagement devant les députés« .

« Regarder le monde tel qu’il est, pas comme on voudrait qu’il soit ! »

« Les symboles en politique sont importants. En homme de gauche, j’ai donc, vous vous en doutez, longuement mûri ce vote. J’étais spontanément plutôt contre. J’ai hésité, pris le temps de réfléchir puis j’ai décidé. J’ai voté en m’appliquant la théorie de l’évolution : celle de Darwin. Qui s’applique bien aux symboles mais rarement aux tabous. Le monde évolue et exige adaptation pour survivre. La vérité de François Mitterrand en 1982, quand il instaure l’impôt sur les grandes fortunes (ancêtre de l’ISF), était parfaitement fondée et je l’ai soutenue. C’était une vérité en un temps où les capitaux ne pouvaient pas fuir d’un simple clic sur un clavier d’ordinateur, ou le capital était presque toujours une propriété familiale et nationale (voyez Peugeot, Alstom, ou même le FCSM) et non pas mondialisée. C’était un temps où internet n’existait pas et, avec lui, l’instantanéité et l’universalité des transactions financières. C’était un temps où l’immobilier répondait à une politique de logement et non pas à une logique spéculative qui fait flamber depuis 15 ans les prix de l’immobilier et les loyers de façon indécente. Ce temps est révolu. Appliquer une recette d’il y a 35 ans pour résoudre les questions contemporaines était devenu une erreur. Je ne confonds donc pas les symboles, qui évoluent et qui incarnent des valeurs positives, avec les tabous, qui sont rigides, qui sclérosent, interdisent, sur des fondements souvent très conservateurs.

C’est sur la base de ces mêmes valeurs et symboles que j’ai déposé des amendements au volet logement du PLF 2018, sur les APL et le prêt à taux zéro, pour défendre les intérêts des locataires et de tous ceux qui souhaitent accéder à la propriété, quand ils vivent ou sont issus de quartiers défavorisés avec des revenus faibles ou moyens.

Nous avons eu avec Frédéric Barbier, mon collègue député de la 4ème circonscription, une différence d’approche sur la transformation de l’ISF. Nous avons beaucoup débattu mais nos conclusions sont différentes. Cela ne nous empêchera pas de continuer à travailler en amitié, en confiance et en hommes libres« .