85% de la population de Bourgogne-Franche-Comté à moins de 30 min des Urgences

En juin 2018, l’ARS Bourgogne-Franche-Comté arrêtera son nouveau Projet Régional de Santé. Cette feuille de route détermine les priorités du système de santé en région pour les années 2018-2022. Parmi les grands enjeux qui figurent aussi au premier rang des préoccupations des habitants : l’accès aux soins urgents. Le 4 avril 2018 à Dijon, le Directeur Général de l’ARS a présenté les orientations proposées en Bourgogne-Franche-Comté. Centres de régulation, services d’urgence… ces dernières semaines, de l’Yonne à la Nièvre en passant par la Haute-Saône, la question de l’accès aux soins urgents a suscité questionnements et inquiétudes en Bourgogne-Franche-Comté. L’Agence Régionale de Santé fait de cette problématique l’une des priorités de sa stratégie de santé, dans une région où elle se pose avec une particulière acuité compte tenu à la fois de l’étendue du territoire et du manque de médecins urgentistes.

Mercredi 4 avril 2018, au siège de l’ARS, à Dijon, le Directeur Général de l’ARS, Pierre Pribile, a présenté l’organisation prévue dans le schéma régional de santé, partie intégrante du Projet Régional de Santé 2018-2022. Cette organisation, soucieuse de mieux préserver les trop rares ressources humaines d’urgentistes dont dispose la région, vise à améliorer la qualité des soins urgents, dans le respect des impératifs d’accessibilité. La Bourgogne-Franche-Comté compte aujourd’hui 29 structures des urgences, 32 implantations de SMUR et 5 centres de régulation. Les réorganisations portent sur les services d’urgences à faible activité, les services mobiles d’urgences et de réanimation (SMUR), les centres de réception et de régulation des appels et les transports héliportés. Mais l’amélioration de l’accès aux soins non programmés et urgents implique d’autres objectifs également bien identifiés dans le plan d’action régional sur les urgences défini en partenariat avec l’ensemble des acteurs concernés, et qui passe notamment par le renforcement de la permanence et de la continuité des soins de ville. Entre 2013 et 2016, en Bourgogne-Franche-Comté, le nombre de passages aux urgences a progressé de 12%, pour s’établir autour de 805 000 passages par an. 12% de ces passages concernent des personnes de plus de 80 ans.

Médecins urgentistes : une ressource rare

Le fonctionnement d’un site comportant à la fois un SMUR et un service d’urgences 24h/24 toute l’année suppose la présence de deux urgentistes à tout instant. Il mobilise donc l’équivalent de 11 médecins urgentistes à temps plein. 250 postes de praticiens hospitaliers urgentistes, plus de 330 en intégrant les médecins contractuels, sont pourvus dans la région. En appliquant la réglementation sur le temps de travail, il manque par conséquent 140 à 220 équivalents temps plein pour assurer les lignes existantes (services d’accueil des urgences, SMUR, centres 15). Résultat, les urgences de la région fonctionnent actuellement en augmentant le temps de travail des urgentistes et en mobilisant de nombreux médecins intérimaires, avec les différents problèmes que ce recours systématique à un appui normalement temporaire peut impliquer (difficulté du management, qualité de la prise en charge, continuité du service…). Des fermetures intempestives se produisent d’ailleurs déjà, notamment en période estivale, lorsque les établissements ne parviennent purement et simplement pas à trouver d’intérimaire.

Sites d’urgences : adapter l’organisation à l’activité de chaque site

Certaines structures d’urgences de la région enregistrent une faible activité, avec moins de 30 passages par jour. A Clamecy par exemple, où deux urgentistes sont présents 24h/24, on enregistre 5 à 6 passages par nuit entre 20 heures et 8 heures, et le SMUR sort une fois toutes les trois nuits. Les réorganisations, qui n’impliquent aucunement la fermeture complète de ces services, doivent permettre de recourir à un seul urgentiste au lieu des deux médecins mobilisés aujourd’hui alors que l’activité est faible. Certains sites hospitaliers de la région ont d’ores et déjà mis en place des organisations en ce sens : soit en assurant l’accueil du public aux urgences suivant certains créneaux horaires en journée, comme c’est déjà le cas à Luxeuil, Lure en Haute-Saône ou Champagnole dans le Jura, permettant à l’urgentiste présent la nuit d’assurer les sorties SMUR ; soit en conservant un accueil 24h/24 aux urgences avec un seul urgentiste et en appliquant un protocole de prise en charge en cas de sortie SMUR : recours à un médecin d’astreinte dans un autre service par exemple, comme c’est d’ores et déjà le cas à Morez (Jura). Les réorganisations impliquent par ailleurs une réflexion à l’échelle des groupements hospitaliers de territoire (GHT) qui scellent aujourd’hui les coopérations entre les différents établissements hospitaliers (la Bourgogne-Franche-Comté compte 12 GHT) avec un objectif : créer des équipes territoriales d’urgentistes. Elles doivent se fonder sur un dialogue que l’ARS souhaite constructif et apaisé avec l’ensemble des acteurs, en particulier les sapeurs-pompiers ou les transporteurs sanitaires.

Services mobiles d’urgence et de réanimation (SMUR) : projeter les moyens sur les urgences vitales

Infarctus, AVC, accident de la route, garantir à tous les habitants de la grande région un accès aux soins urgents en moins de 30 minutes impose de conserver le maillage actuel des SMUR, bien que l’activité de certains de ces services soit parfois très faible. Plus de 85% de la population de la région est domiciliée à moins de 30 minutes d’un service d’urgences ou d’une antenne du SMUR, 12% entre 30 et 45 minutes, 1,5% de la population demeurant à plus de 45 minutes de ces services, des habitants du Morvan, ou du plateau de Maiche-Morteau dans le Doubs. Pour ces secteurs, des solutions alternatives sont mises en oeuvre avec l’appui de médecins de ville correspondants du SAMU et/ou de médecins pompiers qui prennent en charge les urgences vitales avant l’arrivée d’un SMUR.

Centres de régulation (centres 15) : des plateformes renforcées et professionnalisées

Les centres de réception et de régulation des appels téléphoniques au 15 (CRRA 15 ou centres 15) rassemblent des assistants de régulation médicale et des médecins urgentistes pour assurer
l’orientation et la prise en charge des patients. Une ligne de régulation 24 heures sur 24 mobilise l’équivalent de 6 temps pleins d’urgentistes. La Bourgogne-Franche-Comté compte 5 centres 15, à Besançon, Dijon, Chalon-sur-Saône, Auxerre et Nevers. La réorganisation proposée par l’agence consiste à passer à 3 centres, en confiant progressivement la régulation des appels de la Nièvre (courant 2018) puis de l’Yonne (sur l’échéance du Projet Régional de Santé), à Dijon. Objectifs, améliorer la qualité de la régulation médicale des appels, libérer du temps médical
sur le terrain au profit des services d’urgences et des SMUR. L’ARS se fonde sur l’expérience réussie de la Franche-Comté, où le regroupement de 4 centres de régulation s’est opéré sur Besançon entre 2005 et 2015 (le dernier en date étant le territoire de Belfort). Résultat, en 2016, le CRRA de Besançon a répondu à 550 000 appels, dont 90% en moins de 1 minute grâce à une équipe de 35 médecins régulateurs et de 47 assistants de régulation médicale. Ces assistants, dont l’activité est encadrée par des « superviseurs », gagnent en professionnalisation et en sécurisation. Le regroupement a également facilité la mise en place d’outils et de procédures partagés avec les ambulanciers et les sapeurs-pompiers.

La régulation en chiffres : près de 1,3 million d’appels gérés par les centres 15 de la région en 2016. Plus de 700 000 dossiers de régulation ouverts en 2016. Environ 300 000 dossiers pour la Franche-Comté sur le site de Besançon, 150 000 à Dijon, 140 000 à Chalon, 78 000 à Auxerre, 58 000 à Nevers.

Transports héliportés : intensifier leurs interventions

Le Projet Régional de Santé fixe l’objectif d’intensifier le recours aux transports héliportés, en appliquant une doctrine d’emploi commune, pour réduire le temps d’accès au patient et son transport vers le lieu le plus adapté, mais aussi pour limiter le temps d’intervention des équipes mobiles du SMUR et augmenter ainsi leur disponibilité. La Bourgogne-Franche-Comté compte 4 héliSMUR basés à Dijon, Besançon, Auxerre et Chalon-sur-Saône, et 1 hélicoptère de la sécurité civile basé à Besançon.

Des leviers pour éviter la saturation des services d’urgence

Le plan d’action régional sur les urgences vise à articuler les urgences hospitalières et la médecine de ville, pour apporter une réponse coordonnée et pertinente aux demandes de soins urgents et non programmés. Il prévoit notamment de renforcer la permanence et la continuité des soins de ville. Des consultations non programmées seront développées en ville, par exemple dans les
maisons de santé, pour définir des réponses alternatives. Le cahier des charges régional, qui définit la permanence des soins ambulatoires, est en cours de révision. Il sera mis en œuvre dès août 2018 dans une nouvelle version qui tient compte de cet objectif. Pour traiter la saturation des services d’urgences, encore observée ces dernières semaines, l’ARS prévoit aussi de mettre en œuvre une filière pour les personnes âgées , aux urgences, ainsi qu’en amont et en aval : organisation des prises en charge directes dans le service en lien avec le centre 15, recours à un spécialiste dès la prise en charge, notamment en unité d’hospitalisation de courte durée (UHCD), prévention des ré-hospitalisations en urgence en organisant la sortie de la personne âgée avec des professionnels de santé de proximité. C’est tout le sens des actions conduites par ailleurs pour proposer des numéros d’appels uniques à ces professionnels, dans le but de les aider à orienter leurs patients dans le système (les plateformes territoriales d’appui, 5 sont en cours de constitution en Bourgogne-Franche-Comté). La stratégie régionale met également l’accent sur l’amélioration de la prise en charge des personnes en situation de handicap en médecine d’urgence (formation des professionnels, outils de coordination avec les services médico-sociaux…).

(texte ARS)